jeudi 4 avril 2013

Histoire du chevalier Des Grieux et de Manon Lescaut - Abbé Prévost



L'histoire
En 1715, à Pacy, près d'Evreux, le marquis de Renoncour, connu sous l’appellation de l'homme de qualité, fait la rencontre d’un jeune homme. Ce dernier, qui refuse de lui révéler son identité, accompagne une jeune femme faisant partie d’un convoi de filles prêtes à être déportées en Louisiane, à la Nouvelle Orléans. Touché par le désarroi du jeune homme, Renoncour intervient auprès des gardes et obtient contre six louis d'or que les deux jeunes amants puissent se parler autant qu'ils le souhaiteront jusqu'à leur arrivée au Havre.
Deux ans plus tard, Renoncour retrouve le jeune homme à Calais. Cette fois-ci, le jeune homme accepte de lui confier son histoire.
Tout commence à Amiens en 1712. Futur chevalier de l’ordre de Malte, Des Grieux, un jeune homme âgé de 17 ans termine ses études de philosophie. Il fait la connaissance de la jeune Manon Lescaut que ses parents envoient au couvent. Immédiatement séduit, le jeune homme réussit à la convaincre de s'enfuir avec lui. Le couple s'installe à Paris, dans un meublé situé rue Vivienne. Au bout de 3 semaines, les ressources financières du couple commencent à s’épuiser et Des Grieux, qui veut se réconcilier avec son père, propose à Manon de la lui présenter afin d’obtenir sa permission de l’épouser mais celle-ci refuse. Il apprend un peu plus tard par sa domestique qu’un certain M. de B. est venu rendre visite à Manon et qu’il est sorti de l’appartement de façon furtive. Des Grieux s'interroge sur la fidélité de Manon. Puis, un soir, au moment du souper, Manon fond en larmes. Peu de temps après, on frappe à la porte et Manon part s’enfermer. Des Grieux est alors emmené par les laquais de son père qui le ramènent chez lui à Amiens. Son père lui apprend qu’il a été dénoncé par M. de B. lequel a organisé son enlèvement avec l’aide de Manon. Agité par des sentiments contradictoires à l’égard de Manon, Des Grieux se réfugie dans les livres, ce qui l’aide à oublier Manon. Il reste à Amiens pendant 6 mois puis il reprend des études de théologie au séminaire de Saint-Suplice, à Paris, avec son ami Tiberge. Tout se passe pour le mieux pendant un an. Cependant, à la suite d’un exercice public de théologie auquel se prête Des Grieux, Manon vient le voir et le supplie de lui pardonner. Les résolutions catholiques sont alors vite envolées et Des Grieux fuit une fois de plus pour s'installer avec Manon à Chaillot. Commence alors une longue série d’aventures fâcheuses qui conduiront Des Grieux et Manon à leur perte.

Mon avis
L'histoire du chevalier Des Grieux et de Manon Lescaut est le récit rétrospectif d’une passion amoureuse dévorante. Lorsqu’il rencontre Manon, Des Grieux éprouve un véritable coup de foudre. Et cet amour, qui naît si brutalement, lui donne force et courage, et le pousse non seulement à prendre des initiatives mais aussi à commettre des actes insensés. Bientôt, il ne vit et ne respire que pour Manon. Il est alors prêt à tout supporter pour ne pas perdre cette amante certes un peu volage, mais extraordinairement sensuelle.
Le style fluide et sobre de l’Abbé Prévost séduit dès les premières pages et l’on ne s'ennuie pas un seul instant à la lecture de cet ouvrage riche en émotions et en rebondissements. L'écriture est tellement habile qu’on se surprend à s’attendrir sur les malheurs des personnages (dont ils sont pourtant entièrement responsables) et à leur pardonner toutes leurs dérives.
Le caractère tragique de l'histoire et l'atmosphère un peu désuète du 18ème siècle en font donc un roman plein de charme et de tendresse, dont je vous recommande la lecture.

Mes citations préférées
"Les secours célestes sont à tous moments d'une force égale à celle des passions."
"La plupart des grands et des riches sont des sots : cela est clair à qui connaît un peu le monde. Or il y a là-dedans une justice admirable : s'ils joignaient l'esprit aux richesses, ils seraient trop heureux, et le reste des hommes trop misérable. Les qualités du corps et de l'âme sont accordées à ceux-ci, comme des moyens pour se tirer de la misère et de la pauvreté."
"Le commun des hommes n'est sensible qu'à cinq ou six passions, dans le cercle desquelles leur vie se passe, et où toutes leurs agitations se réduisent. Otez-leur l'amour et la haine, le plaisir et la douleur, l'espérance et la crainte, ils ne sentent plus rien."
"Le coeur n'a pas besoin de se consulter longtemps pour sentir que, de tous les plaisirs, les plus doux sont ceux de l'amour."
"Un coeur de père est un chef-d'oeuvre de la nature ; elle y règne, pour ainsi parler, avec complaisance, et elle en règle elle-même tous les ressorts."

Quelques extraits
"Elle me parut si charmante que moi, qui n'avais jamais pensé à la différence des sexes, ni regardé une fille avec un peu d'attention, moi, dis-je, dont tout le monde admirait la sagesse et la retenue, je me trouvai enflammé tout d'un coup jusqu'au transport."
"Mon coeur s'ouvrit à mille sentiments de plaisir dont je n'avais jamais eu l'idée. Une douce chaleur se répandit dans toutes mes veines. J'étais dans une espèce de transport, qui m'ôta pour quelque temps la liberté de la voix et qui ne s'exprimait que par mes yeux. Mademoiselle Manon Lescaut, c'est ainsi qu'elle me dit qu'on la nommait, parut fort satisfaite de cet effet de ses charmes."
"S'il est vrai que les secours célestes sont à tous moments d'une force égale à celle des passions, qu'on m'explique donc par quel funeste ascendant on se trouve emporté tout d'un coup loin de son devoir, sans se trouver capable de la moindre résistance, et sans ressentir le moindre remords."
"Rien n'est plus admirable, et ne fait plus d'honneur à la vertu, que la confiance avec laquelle on s'adresse aux personnes dont on connaît parfaitement la probité.  On sent qu'il n'y a point de risque à courir. Si elles ne sont pas toujours en état d'offrir du secours, on est sûr qu'on en obtiendra du moins de la bonté et de la compassion."
"Manon était une créature d'un caractère extraordinaire. Jamais fille n'eut moins d'attachement pour l'argent, mais elle ne pouvait être tranquille un moment, avec la crainte d'en manquer. C'était du plaisir et des passe-temps qu'il lui fallait. Elle n'eût jamais voulu toucher un sou, si l'on pouvait se divertir sans qu'il en coûte."
"J'avais perdu, à la vérité, tout ce que le reste des hommes estime ; mais j'étais maître du coeur de Manon, le seul bien que j'estimais. Vivre en Europe, vivre en Amérique, que m'importait-il en quel endroit vivre, si j'étais sûr d'y être heureux en y vivant avec ma maîtresse ? Tout l'univers n'est-il pas la patrie de deux amants fidèles ? Ne trouvent-ils pas l'un dans l'autre, père, mère, parents, amis, richesses et félicité ?"

Ma note


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